

Maj Joachim Nnanna
Spécial Stag
Lorsque je travaillais avec des soldats au 1RCHA, je me demandais souvent comment je me retrouvais à exercer mon ministère auprès des hommes et des femmes des Forces armées canadiennes (FAC) dans ce contexte.
Je suis né et j’ai grandi au Nigéria — sur le continent africain — mais je suis maintenant fier de servir comme aumônier dans les FAC. Rien, à part l’expérience, ne m’a jamais préparé à ce travail dans un environnement multiconfessionnel avec des hommes et des femmes d’origines ethniques et religieuses aussi diverses.
Je n’aurais jamais imaginé qu’un endroit aux perspectives aussi hétérogènes puisse m’accueillir tel que je suis.
Je viens d’un pays où les gens étaient plus semblables que différents. Nous étions une majorité, les Nigérians; un peuple avec la même couleur de peau, des pratiques similaires et des normes culturelles universelles. La différence ne m’était pas familière.
Lorsque je suis arrivé au Canada il y a 17 ans, j’ai connu un changement majeur par rapport à ce que je connaissais. Je n’étais pas un Noir comme les autres. Dans la petite communauté où je me trouvais, j’avais l’impression d’être le seul Noir. Et bien sûr, j’ai dû relever tous les défis auxquels les immigrants sont confrontés.
En tant qu’Africain et minorité sur le plan culturel, mes expériences et mes rencontres n’ont pas toujours été positives et agréables, surtout lorsque la couleur de ma peau est différente de celle de la population générale.
Le fait d’être « différent » n’était pas toujours accueilli avec l’amabilité typique des Canadiens. Pour m’intégrer, j’ai dû travailler très fort pour atténuer mon accent, pour ignorer les regards occasionnels des gens et pour ne pas m’énerver lorsque j’étais traité différemment, ce qui est arrivé.
Même si j’étais un prêtre civil qui exerçait son ministère auprès des gens, je n’avais pas vraiment l’impression d’appartenir au Canada dans ces premiers jours, voire ces premiers mois et ces premières années. Cependant, avance rapide jusqu’au jour même où je suis devenu citoyen canadien.
Sept ans après avoir posé le pied au Canada, c’est le jour où ma vie s’est transformée. Après avoir prêté le serment sous le drapeau rouge et blanc et obtenu la citoyenneté, j’ai marché avec une certitude inspirée par la foi jusqu’au bureau de recrutement du MDN à Oshawa, en Ontario, où j’ai demandé à être inscrit. J’ai ramassé la trousse de recrutement sans aucune hésitation.
Même si nous n’aimons pas le penser, la discrimination raciale et les préjugés sont bien réels au Canada et ils sont encore présents dans des endroits où ils ne devraient pas l’être. Bien que je l’aie ressentie et vécue moi-même, une grande partie de la discrimination que j’ai subie dans ce pays s’est dissipée lorsque je me suis engagé dans l’armée.
Revêtir l’uniforme a changé le paradigme de ma vie. Mes épaulettes, mon béret et mes bottes ont renforcé mon sentiment d’appartenance, mais surtout, ils ont changé ce que j’étais pour les autres. Je n’étais plus un immigrant, je n’étais plus seulement un Africain noir; j’étais un officier des CAF qui était respecté pour ce que je pouvais offrir dans ma vocation.
En tant qu’aumônier, qui pouvait être envoyé dans n’importe quel élément, je suis rapidement devenu un booster de moral, un marchand d’espoir et un collègue pour voyager avec les autres.
Ce qui semblait faire le lien entre tout cela, c’est que j’étais un membre actif, qui détenait la Commission de la Reine avec le plus grand honneur et la plus grande servitude.
Bien que le racisme existe toujours, la sensibilisation à la discrimination s’accroît chaque jour. Nous prenons souvent pour acquis la diversité que nous célébrons en tant que Canadiens et particulièrement au sein des FAC, et la façon dont la diversité nous enrichit individuellement et collectivement.
Nous vivons et respirons quotidiennement notre identité de mosaïque culturelle parce que beaucoup d’entre nous ne connaissent rien d’autre. Nous pensons souvent que notre valeur canadienne d’inclusion est la norme dans d’autres parties du monde, mais quand il s’agit de la diversité et de la célébration de nos différences, bien que nous ne soyons pas encore parfaits, le Canada a fait un long chemin et se distingue comme un pays à émuler.
Lorsque j’ai été déployé sur l’Op PROJECTION avec la Marine en 2017, j’ai eu le privilège de rencontrer et de travailler avec des marins d’autres pays. Au cours de diverses marines amies et visites diplomatiques, la question constante que l’on me posait était la suivante : » Comment se fait-il qu’ils vous aient permis de faire partie de leur Marine? » À quoi je répondais toujours: » La marine de qui ? »
J’expliquais fièrement que je suis un Canadien comme tous les autres marins que vous voyez sur ce navire et qu’ils me considèrent comme tel. J’ai souvent réfléchi à la raison de cette question et de cette curiosité de la part des autres, et je me suis rendu compte que le Canada est l’un des rares pays au monde où, avec du dévouement et un travail acharné, un immigrant peut s’élever à n’importe quel niveau.
Dans mes échanges avec les marins d’autres pays, je n’ai rencontré personne qui était « différent » ou qui se démarquait de l’ethnie homogène, et il m’est donc apparu évident que cet honneur de la diversité est l’une des beautés du Canada.
Une autre chose remarquable que j’ai remarquée pendant l’Op Projection en 2017 est que dans chaque pays que nous avons visité, que ce soit les Philippines, la Corée du Sud, la Chine, le Japon ou la Malaisie, il y avait toujours un marin canadien qui était originaire de la région et qui était prêt à servir de traducteur et de conseiller culturel officieux.
Cela étonnait les marins d’autres nations et témoigne de la richesse des ressources humaines que nous avons au Canada. En tant qu’Africain, je suis en mesure de partager les valeurs que j’apporte avec moi au Canada et aux FAC.
Parmi ces valeurs, on retrouve un fort sentiment d’appartenance à la communauté, l’optimisme face à la vie, une révérence inébranlable pour le sacré, le respect des aînés et des autorités dûment constituées, une loyauté inébranlable envers sa tribu, qui dans mon cas se trouve être le Canada, le rire et la joie comme antidote à tous les problèmes de la vie et un sentiment de fierté envers ses racines.
Ces valeurs colorent chacune de mes interactions avec les soldats et façonnent ma façon de traiter les autres. En ce qui me concerne, nous vivons dans le meilleur pays du monde et je suis privilégié d’être un officier des FAC.
Alors que nous célébrons le mois de l’histoire des Noirs et soulignons les réalisations des Noirs dans l’histoire de notre pays et de notre armée, nous célébrons également notre détermination collective à continuer de faire de ce pays un lieu de réalisation des rêves.
En tant qu’aumônier dans les FAC, j’ai le privilège de fournir un ministère de présence aux membres, de défendre les questions de moral et de bien-être, de conseiller la chaîne de commandement sur les questions morales et éthiques, d’offrir une évaluation de l’espace religieux pendant le déploiement et de fournir une formation sur la résilience spirituelle.
Je suis déployé avec les militaires pour partager leur vie tout en faisant face aux mêmes épreuves qu’eux. J’ai également l’occasion d’exercer mes fonctions sacramentelles dans les chapelles des FAC où je suis affecté et, que je m’occupe d’un homme ou d’une femme, d’un jeune ou d’un vieux, d’un religieux ou d’un non-religieux, quelle que soit son origine ethnique ou son orientation sexuelle, je sais que je m’occupe d’un Canadien qui doit être traité avec dignité et respect.
Pendant que je travaillais avec le 1RCHA, j’ai aussi été déployé sur l’Ex FROZEN GUNNER. Comme son nom l’indique, il s’agit d’un exercice de guerre hivernale qui entraîne les soldats à combattre dans des conditions hivernales austères.
Sur le terrain, ma tâche consistait à être un rappel visible de la présence du Divin. Ma capacité à partager la souffrance des soldats me rend légitime et digne de confiance lorsqu’il s’agit de conseiller les soldats et de cheminer avec eux. Pendant le mois de l’histoire des Noirs, je m’attache à rappeler aux soldats la richesse de la diversité dont nous jouissons dans ce pays et à leur rappeler qu’ils ne doivent pas considérer ce fait comme acquis.
Je m’attache à raconter mon histoire, celle d’une personne qui a reçu de ce pays et des FAC plus que je ne pourrais jamais imaginer.
Je rappellerai aux soldats que les valeurs dont nous jouissons dans ce pays n’ont pas été acquises sans sacrifice et que notre diversité est notre force.
Je me souviens clairement d’une conversation que j’ai eue avec un marin qui se lamentait de devoir nettoyer les ponts du navire alors que nous approchions de la maison après notre long déploiement.
Alors que je me prélassais dans l’euphorie du retour au Canada, home sweet home, que je sifflais et que je m’amusais à laver le navire, ce jeune marin m’a demandé pourquoi je semblais prendre autant de plaisir à faire ce genre de travail.
Je me suis tourné vers lui et j’ai répondu: « Il y a 25 ans, je n’avais pas de bicyclette à laver, mais aujourd’hui, je lave le navire canadien de Sa Majesté. Les choses s’améliorent vraiment. »
Ce sont des points de vue comme celui-ci qui témoignent d’un véritable changement de paradigme et de la célébration de ce que les possibilités que nous offre la diversité apportent à la table.
Mon histoire n’est qu’une seule. Mais elle témoigne de ce que nous sommes et de ce que nous devons continuer à être en tant que nation et en tant qu’organisation de défense nationale. Maintenant que je ne suis plus au Manitoba pour servir au sein du 1RCHA, je me console en me disant que je m’entraînais parmi les artilleurs pour être prêt à être déployé partout où l’on aurait besoin de moi, ce qui est une façon de redonner au Canada.
« Nous montons la garde pour toi! »
Le Maj Joachim Nnanna, ancien aumônier régimentaire du 1RCHA, est maintenant l’aumônier de l’escadre de la BFC Trenton
Le Cdt Joachim Nnanna a ensuite fait un service de Pâques pour un public attentif lorsque son église a rouvert ses portes après la pandémie de COVID-19. Photos Jules Xavier/Shilo Stag






